Cultures spécialisées

Arboriculture : moutons y es-tu ?

Avec le développement du bio ces dernières années, certains arboriculteurs ont décidé d’aller plus loin et de faire revenir les animaux dans les vergers. Ce n’est en soi pas une nouveauté, plutôt un retour à d’anciennes pratiques, remises aujourd’hui au goût du jour.

Une brebis et son agneau dans une pommeraie.

Les agriculteurs ayant remis des animaux dans leurs vergers avancent des atouts multiples. Tout d’abord, ces animaux participent aux revenus de l’exploitation et permettent parfois le développement d’un atelier de vente directe (vente des œufs de poule, balade pour les chevaux, etc.). Mieux, ils contribuent en partie à l’entretien des cultures, à condition de prendre quelques précautions préalables. Ainsi, les cochons, qui passent environ 80 % de leur temps à brouter, se font un malin plaisir à s’occuper de l’herbe. Une aide qui réduit le travail du sol et facilite la gestion de l’enherbement. Leur passage incessant sur les terrains est également une arme fort appréciable de piétinement et donc de destruction de galeries de campagnols, par exemple. Généralement, trois à quatre mois après l’introduction de porcs dans un verger, les populations de campagnols sont nettement moins nombreuses. Mais pour réfréner leur entrain, il peut être intéressant de délimiter les parcelles avec trois fils électriques afin de les compartimenter afin de limiter les dégâts qu’ils pourraient causer sur les arbres.

Des aspirateurs sur pattes

Autre animal intéressant en arboriculture, notamment en pommiers : le mouton. Cet " aspirateur " à feuilles et fruits tombés au sol permet de réduire l’inoculum de tavelure en éliminant ces sources d’expansion. Il peut également nettoyer les haies et les recoins, notamment sous les arbres. Mais là aussi, toute médaille a son revers : il faut faire attention à la densité des animaux positionnés dans le verger. Car le mouton mange en général tout ce qui se trouve à une hauteur de 1 à 1,50 m. L’introduction des animaux dans le verger doit donc se raisonner, à la fois en termes de densité, mais aussi de saison, afin qu’ils n'affectent pas la future récolte.

Les vaches peuvent également pâturer dans les vergers. Mais il vaut mieux les introduire une fois que les feuilles des arbres fruitiers se sont développées. À ce stade, les vaches préféreront brouter l’herbe plutôt que les fruitiers. À noter que les oies et les canards sont également intéressants pour brouter l’herbe et réduire la pression de carpocapse. Toutes ces espèces animales ont également un point commun : en les laissant pâturer librement dans les vergers, l’arboriculteur peut réduire, voire supprimer, ses apports de matière organique pour gérer sa fertilisation.

 

Déclaration obligatoire auprès de la DDPP

Mais un arboriculteur ne se transforme pas du jour au lendemain en éleveur. Les deux métiers sont différents. Un arboriculteur peut choisir, par exemple, d’ouvrir ses vergers à un berger itinérant. Une solution qui permet de bénéficier des avantages des animaux sans en avoir les inconvénients de gestion au quotidien (surveillance du troupeau, gestion des parcelles mobiles, etc.). Dans tous les cas, il n’est pas exempté de se mettre en conformité avec la réglementation sanitaire (lire ci-contre). D’autant que tout élevage doit faire l’objet d’une déclaration auprès de la Direction départementale de la protection des populations (DDPP), qui délivre à l’éleveur un numéro d’identification (et un code " œuf " dans le cas d’un élevage de poules pondeuses).

Au final, l’introduction d’animaux dans les vergers reste aujourd’hui une pratique marginale, car trouver l’équilibre entre ces deux productions sans se spécialiser n’est pas simple. De plus, certaines complications (chapardage de poules par les renards, grignotage des bourgeons fruitiers et de l’écorce par les brebis, éloignement des abattoirs, etc.) peuvent démotiver plus d’un agriculteur. « Il est à noter que le pâturage induit une évolution de la flore et de la diversité floristique présente dans le couvert ; cependant, nous manquons de recul pour dire si cette évolution est positive ou négative » relevait d’ailleurs une étude réalisée par l’Inter réseau Agriculture, énergie, environnement en Paca. Cette structure est à l’origine d’enquêtes et de simulations, réalisées dans le cadre d’un projet financé par la région Paca visant à valoriser les bonnes pratiques énergétiques. Les incidences, positives et négatives, de la mixité restent donc encore à affiner.