Élevages

Fin programmée du broyage des poussins mâles pour 2022

L'interdiction prendra effet à partir du 1er janvier 2022. Le ministre de l'Agriculture Julien Denormandie et son homologue allemand travaillent à une harmonisation européenne sur la question.

La fin programmée du broyage des poussins mâles pour 2022

« C’est une avancée majeure qui était attendue de longue date », s’est félicité Julien Denormandie sur Twitter le 18 juillet dernier, faisant de la France « le premier pays au monde à mettre fin à l’élimination des poussins mâles », a-t-il ajouté. Lundi en conférence de presse, le ministère de l'Agriculture a rappelé que « la France est le premier producteur d'œufs en Europe. Nous avons une responsabilité et il nous incombe de porter cette mesure ». Chaque année50 millions de poussins mâles sont broyés ou gazés en France, après avoir été triés et séparés des femelles juste après leur naissance, faute de ponte et de rentabilité.

La filière œufs « fera tout » pour ne plus éliminer de poussins mâles à la naissance courant 2022, affirmait mardi 20 juillet le président de l'interprofession, Philippe Juven.  « On fera tout pour répondre à cet objectif dans les délais qui nous sont impartis, […] mais le calendrier est quand même serré », a-t-il prévenu, alors que le prédécesseur de M. Denormandie, Stéphane Travert, s'était engagé en 2018 à mettre fin à la pratique avant fin 2021.

Détection du sexe avant la naissance

À partir du 1er janvier 2022, « tous les couvoirs devront soit avoir installé, soit commandé les machines permettant de réaliser des méthodes alternatives », a déclaré Julien Denormandie en marge du conseil des ministres de l’Agriculture organisé à Bruxelles le 19 juillet. Ajoutant que « l’ensemble de ces machines devront être mises en place au courant de l’année 2022 ».
Ces nouvelles machines doivent permettre le sexage in ovo, ou spectrophotométrie, c’est-à-dire la détection du sexe des poussins au stade dembryon, dans l'œuf. Les éleveurs pourront distinguer à travers la coquille la couleur des premières plumes des embryons mâles, différente de celle des femelles, et ainsi détruire les œufs avant leur éclosion.

Une technologie qui représente logiquement un coût pour les cinq couvoirs français, chiffré par la filière à 15 millions deuros. Le gouvernement, de son côté, promet des subventions à hauteur de 10 millions d’euros dans le cadre du plan France Relance.
Par ailleurs, lovosexage en lui-même constituerait, selon la profession, un surcoût annuel estimé à 64 millions deuros soit 4 % du chiffre daffaires de la filière. Le ministère de lAgriculture estime quant à lui la hausse « à un centime par œuf sexé avec la machine la moins chère » et « jusqu'à quatre centimes » par œuf analysé avec lappareil le plus coûteux.

Jeunes Agriculteurs alerte sur le surcoût

Manon Pisani

Si le président de la filière M. Juven a suggéré la mise en place dune cotisation prélevée sur chaque œuf vendu, c’est surtout une perte de compétitivité face aux concurrents européens et internationaux qui est redoutée. « Il y a un risque de voir deux marchés de l’œuf apparaitre : l’un avec ovo-sexage et l’autre sans, forcément moins cher », analyse Manon Pisani, élue JA Nat' référente sur le bien-être animal.

« Ce serait dommage car la filière française est plutôt porteuse pour les jeunes, que ce soit en activité principale ou en diversification. On ne peut qu’être pour l’amélioration du bien-être animal, mais attention ce que les éleveurs ne payent pas les conséquences encore une fois », conclut Manon Pisani, qui alerte également sur les délais annoncés, « presque du jour au lendemain ». 

Une coordination européenne amorcée

Lors du Conseil des ministres de l’Agriculture des vingt-sept du 19 juillet, et malgré les réticences émises par quelques-uns de ses homologues notamment en matière de concurrence hors UE, Julien Denormandie a reçu le soutien d’une dizaine d’États membres (Luxembourg, Finlande, Chypre, Irlande, Espagne, Belgique, Pays-Bas, Grèce, Slovaquie, Portugal) en plus de l’Allemagne qui a voté en mai une loi similaire interdisant le broyage des poussins mâles à partir du 1er janvier 2022.
Enfin, la commissaire européenne à la Santé, Stella Kyriakides, a répondu que le sujet serait évalué dans le cadre de l’étude d’impact qui accompagnera ces propositions de révision de l’ensemble de la législation communautaire sur le bien-être animal, attendue pour 2023.