Innovations

L’intelligence artificielle s’invite dans la nature

Des capteurs, des données, des logiciels d’interprétation, des machines et des applications capables d’exécuter des tâches préétablies, mais aussi de prendre des décisions : bienvenue dans l’intelligence artificielle appliquée à l’agriculture.

Téléphone portable tenu dans une main.

Après la mécanisation, la numérisation et la robotisation, l’intelligence artificielle est-elle la prochaine révolution guettant l’agriculture au détour d’une fourrière, d’un hangar, d’une étable ? Sans aucun doute. Elle ne dit pas encore son nom, mais l’intelligence artificielle s’invite subrepticement à bord des machines agricoles. On parle d’intelligence artificielle quand une machine ne fait pas que réagir aux commandes de son opérateur et/ou aux programmes embarqués, mais qu’elle interfère sur ces derniers. Elle génère alors des actions propres issues de son expérience, le tout sous la gouverne de force capteurs et algorithmes.

En quoi se distingue-t-elle des robots de traite ou de distribution de fourrage en usage aujourd’hui dans certains élevages ? Les robots actuels obéissent à des programmes préétablis et figés. Augmentés d’intelligence artificielle, ces mêmes machines seront non seulement capables de reconnaître et d’analyser des données, mais ils pourront en prime évaluer une situation, générer de nouvelles hypothèses et au final pousser des recommandations personnalisées et circonstanciées. En d’autres termes, le robot doté d’IA va enrichir son algorithme de sa propre expérience. C’est le principe de machine apprenante, ou deep learning, concept phare de l’intelligence artificielle.

Agriculteur stratège, machine auto-apprenante

L’intelligence artificielle n’est pas le propre des robots et automates dépourvus d’opérateurs humains. Elle peut aussi être déployée sur des machines réservant encore une place à un opérateur. En agriculture, les premiers développements de l’intelligence artificielle apparaissent sur les moissonneuses-batteuses, dotées d’automatismes de réglage proactif. Ceux-ci intègrent des éléments topographiques grâce au positionnement GPS, ainsi que les données de rendement des années précédentes et des passages adjacents. L’analyse de ces données en temps réel permet à la moissonneuse-batteuse d’adapter le réglage de plusieurs de ses organes (battage, séparation, nettoyage) pour optimiser différents paramètres (débit, qualité, propreté, pertes).

Question : quel rôle reste dévolu au chauffeur dans la cabine ? « Celui de stratège », répond François-Xavier Gibet, chef de produit moissonneuses-batteuses chez Claas.

« C’est le chauffeur qui choisit le scénario de fonctionnement de la moissonneuse-batteuse parmi quatre stratégies de battage : débit maximum, consommation de carburant minimale et qualité de paille maximale, qualité et propreté optimales du grain ou enfin équilibre des trois. C’est aussi le chauffeur qui garde l’œil sur des paramètres tels que la proportion de céréales couchées, la quantité de grain, la quantité de pailles vertes, susceptibles d’aguiller sa stratégie. Le chauffeur reste donc indispensable. Cependant, avec le Cemos auto Treshing, nous inaugurons le concept de machine auto-apprenante qui analyse et enregistre les paramètres de travail passés pour mieux appréhender les conditions présentes. »

New Holland est aussi sur les rangs avec un automatisme de réglage proactif sur ses moissonneuses-batteuses. Le chauffeur conserve là aussi ses prérogatives en dictant à la machine ses priorités concernant les paramètres en question.

 

Robots conversationnels

Les robots conversationnels, ou chatbots, constituent une autre déclinaison de l’intelligence artificielle. En élevage par exemple, les premiers assistants virtuels sur smartphone aiguillent les éleveurs dans leur choix de taureau, facilitent la commande d’insémination, contrôlent les déclarations de sortie d’animaux. C’est ce qu’a présenté par exemple Adventiel au dernier Space avec ses Zen’bots Hello Margo (développé avec Evolution) et Hello Flore (développé avec les EDE Grand Ouest). Simplification administrative, conseil, prise de commande, alertes, etc. Les chatbots peuvent assurer presque toutes les fonctions numériques, et amener l’éleveur à mieux utiliser toutes les plateformes de ses partenaires et fournisseurs.

L’intelligence artificielle, qui tire sa substantifique moelle des milliards de données générées par les objectés connectés (hommes, animaux, parcelles, machines en agriculture) concerne tous les secteurs d’activité : industrie, énergie, services, commerce, médecine.... Non sans poser des questions éthiques et sociologiques : quid des métiers et des emplois de demain ? La mécanisation et la robotisation se substituent aux tâches manuelles. En sera-t-il de même avec l’intelligence artificielle pour les fonctions intellectuelles ?