Le monde agricole réclame de la cohérence après la censure de l’acétamipride
Suite à la décision du Conseil constitutionnel du 7 août 2025, invalidant la réintroduction du néonicotinoïde acétamipride dans la loi Duplomb, le secteur agricole français appelle à davantage de cohérence.

Le Conseil constitutionnel a jugé que la disposition autorisant l’acétamipride était insuffisamment encadrée, en violation de la Charte de l’environnement ; l’article 2 de la loi a donc été censuré. Alors que ce pesticide reste interdit en France mais autorisé dans l’UE jusqu’en 2033, les syndicats demandent le retrait des produits importés traités avec cette substance. Ils dénoncent « une concurrence inéquitable » et une montée des importations, notamment de noisettes ou de betteraves, en l’absence de réautorisation. La FNSEA a dirigé des actions symboliques dans les supermarchés pour alerter les consommateurs et les enseignes.
Pour « un sursaut de patriotisme alimentaire »
Annie Genevard, ministre de l’Agriculture, a appelé à un « sursaut de patriotisme alimentaire » et défendu la recherche d’une harmonisation européenne des règles phytopharmaceutiques, tout en soulignant l’impossibilité pour le moment d’appliquer une clause de sauvegarde pour l’acétamipride. « Ne pénalisons pas deux fois nos agriculteurs, en leur interdisant ce que d'autres pays autorisent, … Il en va de notre identité alimentaire et de notre Histoire commune », défend la ministre.
Un outil juridique difficile à appliquer à l’acétamipride
Le rapport 2022 de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) révèle que l’acétamipride est omniprésent dans l’Union. Il est largement utilisé sur les agrumes, pommes et poires en Espagne, ainsi que sur les pommes, pêches et raisins en Italie, et est retrouvé dans les noisettes ou grenades turques, avec près de 80 % des pêches de l’UE contenant des résidus, selon les données européenne. Pour tenter de freiner les importations traitées, la France avait déjà recours à des clauses de sauvegarde : entre autres exemples, l’interdiction des cerises traitées au diméthoate en 2016 puis au phosmet en 2023. Mais, comme le souligne Benoît Grimonprez, professeur de droit rural à l'Université de Poitiers, une telle mesure s’annonce « difficilement applicable » à l’acétamipride. La molécule est présente dans une grande diversité de produits et sa restriction risquerait de porter atteinte au principe de libre circulation des marchandises au sein de l’UE, sans compter les complications de mise en œuvre pour des produits déjà transformés.
La Commission européenne a relevé les limites maximales de résidus (LMR) d’acétamipride dans plusieurs produits. Le miel passe de 0,05 à 0,3 mg/kg, tandis que les prunes atteignent 0,04 mg/kg et certaines graines comme le pavot (0,3 mg/kg), la moutarde (0,15 mg/kg) ou le lin et le chanvre (0,06 mg/kg). Ces règles s’appliquent aux produits européens et importés. En France, l’usage de l’acétamipride reste interdit après la censure partielle de la loi Entraves par le Conseil constitutionnel, le 7 août.