La production porcine en passe de vivre une nouvelle crise ?
En ce début d’automne 2025, les signaux d’une nouvelle crise porcine se profilent. Un peu partout les prix décrochent en Europe. Un mouvement amplifié par la mise en place récente par la Chine de droits de douane sur le porc européen.

Depuis l’annonce par la Chine de la mise en place à partir du 10 septembre de droits de douane (15,6 à 62,4 %) sur les pièces de porcs en provenance de l’Union Européenne, les cours négociés sur les places européennes de marché du porc dévissent. Que ce soit au Marché du Porc Français (Plérin, Côtes-d’Armor), seul cadran de fixation du prix du vif en France (deux cotations par semaine) qui a perdu 28 centimes du kilo en deux mois ou dans les autres pays producteurs.
En réalité, la mise en place des mesures chinoises n’est pas réellement la cause de la plongée des cours mais agit comme un accélérateur. Car après quasiment trois années d’embellie, la filière porcine a commencé une lente décrue à partir de septembre 2024. Les prix ont entamé depuis une lente décrue. Avec pour conséquences la réduction des « marges des éleveurs, alors même que la demande intérieure reste prudente et que les pressions concurrentielles s’intensifient », indiquait en septembre l’IFIP dans une note de conjoncture.
27 % des exportations européennes vers la Chine
Avec les droits de douane imposés en Chine à l’entrée de certaines viandes et coproduits (typiquement les pieds et les oreilles), les prix pourraient chuter plus vite, craignent les spécialistes. La Chine constitue en effet un débouché important pour l’Europe, avec 27 % de ses exportations. Le maintien en Europe de certaines de ces pièces pourrait alourdir le marché. Il y a en plus un problème franco-français : une offre de mâles entiers plus importante que la demande. Au MPF jeudi 25 septembre, la chute a semblé atteindre un palier avec la reconduction du prix (1,616 euro en prix de base).
Il n’empêche, « c’est un prix qui est tout juste au niveau du coût de production d’un kilo de porc », s’inquiète Sébastien Lamour, éleveur dans le Finistère, en charge du dossier aux Jeunes Agriculteurs de Bretagne. Dans les Pyrénées-Atlantiques, l’éleveuse Manon Pisani ne cache pas non plus son inquiétude. Observant la tension sur les prix un peu partout en Europe, la référente porc aux JA national redoute « de l’anxiété chez les éleveurs et de l’insécurité dans leurs fermes ». La crise latente fait craindre la remise en cause par certains du rôle du MPF dans la fixation du prix.
Des lueurs d’espoir ?
En Bretagne qui représente 58 % de la production nationale (source IFIP), l’Union des groupements de producteurs de viande de Bretagne (UGPVB) « rappelle que le MPF est un outil transparent et reconnu qui a toujours permis de fixer un prix juste et représentatif de la réalité économique ». C’est un outil que les JA défendent ardemment, soulignent Manon Pisani et Sébastien Lamour. Un rassemblement devant les locaux du MPF à Plérin a d’ailleurs été organisée jeudi 27 septembre.
Dans cette situation incertaine, il y a quelques lueurs d’espoir. « En Europe, l’Allemagne a choisi de maintenir son prix directeur, ce qui pourrait favoriser une stabilisation des prix dans les autres pays », indiquait jeudi le MPF sur son site Internet. Par ailleurs, le prix de l’aliment devrait logiquement s’ajuster à la baisse, les cours mondiaux de céréales étant en recul depuis plusieurs mois. Jusqu’à la mi-septembre, ce n’était pas vraiment le cas et les JA Bretagne s’en étaient inquiétés. Enfin, la consommation de viande de porcs reste dynamique.
Julien Piro