Élevages

Influenza aviaire : l’épizootie s’éloigne, la vigilance demeure

Le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire vient d’alléger les dispositifs de prévention et de surveillance d’influenza aviaire. 

Dindes

Le ministère a pris cette mesure après avoir constaté qu’aucun foyer d’influenza aviaire hautement pathogène n’a été détecté dans les élevages en France depuis le 14 mars, a-t-il communiqué le 19 avril. Les mesures de restriction mises en place en novembre 2022 s’adaptent à la nouvelle situation. Si le confinement des animaux reste la règle, les palmipèdes « sont autorisés à sortir (dans les zones indemnes, NDLR) en parcours extérieur réduit (avec maintien d’équipements préservant les animaux des contacts avec la faune sauvage) », précise le ministère. Dans les Pays de la Loire, en Bretagne et dans les Deux-Sèvres, l’effort de surveillance par prélèvement est réduit de moitié.

Il ne s’agit donc que de la levée partielle des règles de biosécurité renforcées à l’automne. « Si les mortalités dans la faune sauvage ont fortement diminué en France, elles restent importantes en Europe », indique le ministère. En l’espace de dix-huit mois, la France a été durement frappée par l’épizootie de 2021 et 2022. En volaille-chair, le canard a payé le plus lourd tribut avec 33,7 % de la production de canards à rôtir perdue en 2022, suivie de la dinde (- 16,9 %), de la pintade (- 7,6 %) et du poulet (- 1 %), selon les chiffres de l'institut technique Itavi. Le poulet étant la première espèce de volaille-chair produite en France (70 % d’une production de 1,7 million de tonnes équivalent-carcasse, la baisse globale se situe à 7,6 % pour l’ensemble des volailles françaises.

Quels enseignements tirer ?

Dans ce bilan de l’influenza aviaire hautement pathogène, il faut intégrer en plus la perte d’activité sur les poules-pondeuses (- 8 % en 2022). « Le retour de la production est attendu en poulet pour 2023 », indique Simon Fourdin, directeur du pôle économie de l’Itavi. Pour le canard, des incertitudes demeurent. Tous les producteurs vont-ils repeupler leurs bâtiments, certains ayant été touchés deux fois dans l’année et d’autres lors des épizooties des années précédentes ? La période de redémarrage est encore plus longue en pondeuses : près de six mois après la levée des zonages. Quels enseignements tirer de cette période jamais vécue pour la filière volaille française ?

En matière de biosécurité, « il y a toujours moyen de faire mieux, notamment pour les camions de livraison d’aliment ou d’enlèvement de nos œufs qui entrent dans l’élevage », explique Yves-Marie Beaudet, producteurs d’œufs et président du CNPO, l'Interprofession de l’œuf en France. Dans son communiqué du 19 avril, le ministère appelle d’ailleurs les éleveurs à affiner leur plan de maitrise de la biosécurité. Des négociations se poursuivent pour savoir quelles espèces vacciner contre l’influenza aviaire hautement pathogène. Le canard devrait y passer en premier. Mais la question mérite d’être traitée sous tous les angles pour les autres espèces. « Pour les pondeuses, la question n’est pas tranchée parce que cela nécessiterait une surveillance importante, ce qui pourrait avoir des conséquences commerciales », poursuit M. Beaudet.     

Christophe Haas, vice-président des JA Nat et référent avicole

Pour permettre à la filière volaille chair et ponte de se redresser et se renouveler après l’épizootie d’influenza aviaire, les JA appellent à la mise en œuvre de deux plans. Un premier de 100 millions d’euros « pour indemniser les producteurs, notamment ceux qui accepteront de désintensifier leur production au moment des migrations de l’automne et du printemps, explique Christophe Haas. Et un second plus important pour accompagner les élevages dans leur transformation. » Cette demande fait partie des différents points avancés par le syndicat à l’ensemble des parties prenantes de la filière avec les pouvoirs publics. Sur la table également, la vaccination. « Nous aimerions qu’elle se fasse rapidement pour le canard et la dinde avec un cofinancement des autres filières ». Il faut aussi parvenir à convaincre les clients à l’export de la France de l’innocuité du vaccin sur les produits de volailles. « Sur les 100 pays tiers de la France, la moitié acceptent le vaccin, 25 sont en discussion avec la France sur le sujet et 25 sont contre. » Or, la fermeture de certains marchés internationaux pourrait mettre à mal des filières en France.