Innovations

Semer les prairies sous couvert de céréales

La technique du semis de prairie sous couvert permet d’implanter une prairie avant la récolte du précédent, et en conséquence de produire plus d’herbe. Plusieurs sites expérimentaux des Pays de la Loire travaillent sur le sujet depuis plusieurs années pour trouver l’itinéraire cultural idéal.

Jean-Luc Gayet inspecte un essai de prairie implantée en même temps qu'une céréale.

De plus en plus d’éleveurs s’intéressent à l’implantation de prairie sous couvert de céréale. Son avantage majeur, si la technique est réalisée correctement, est de faire gagner six mois de pousse de l’herbe. Un atout loin d’être négligeable en cette période de réchauffement climatique où les sécheresses estivales s’imposent un peu plus chaque année.

 

« Le semis de prairie sous couvert peut faire gagner jusqu’à trois cycles de 1,5 t/ha d’herbe », chiffre Jean-Luc Gayet, responsable des essais prairies menés sur la ferme expérimentale de Derval. Il détaille un gain de 80 €/ha pour chaque cycle, soit 320 €/h sur l’année si la prairie s’est bien développée. « Mais il faut aussi prendre en compte d’autres facteurs comme la baisse de rendement sur la céréale ou le gain sur le coût en passage mécanique », nuance l’expert prairie.

Affiner l’itinéraire technique

Sur le site de Derval, Jean-Luc en est déjà au troisième cycle d’expérimentation. Le premier, mené de 2012 à 2015, a permis d’établir la meilleure période d’implantation, tout en écartant les prairies à base de ray-grass hybride et trèfle violet jugées trop agressives. « Dans notre contexte pédoclimatique, le meilleur rendement est obtenu en semant céréales et prairies en automne », explique-t-il. Mais comme les deux doivent être semés en même temps, se pose la question de la fragilité durant l’hiver de la prairie semée entre le 10 et le 25 octobre, notamment pour le trèfle. « Certaines céréales comme l’avoine couvrent et protègent la prairie. Et puis dans notre secteur, nous n’avons plus de vraie gelée l’hiver ... », relativise Jean-Luc Gayet.

Jean-Luc Gayet mesure la pousse de la prairie après un an d'implantation
Un an après le semis, la prairie est correctement implantée

La date de récolte est primordiale

Le deuxième cycle d’expérimentation était consacré aux densités de semis idéales. Dans ce sens, la chambre d’agriculture est partie d’une dose pivot de 260 grains/m² de triticale avec une prairie constituée de 20 kg/m² de ray-grass anglais et 4 kg/m² de trèfle blanc. « Nous n’avons pas constaté de variation de rendement importante selon les densités testées. Par contre la date de récolte peut impacter le rendement de la céréale jusqu’à -50 % », constate Jean-Luc Gayet. En cas de moisson en grain, la fin du printemps est stratégique. Si une sécheresse survient durant cette période, il y a concurrence sur la ressource en eau entre la prairie et la céréale. Il faut donc être opportuniste et savoir récolter la céréale en ensilage ou enrubannage quand les conditions l’imposent. Prévoir de garder les terres les plus profondes pour les céréales à récolter en grain peut aussi s’avérer judicieux.

L’essai actuellement en place pour trois ans a pour but de trouver la dose de protéagineux optimale. Au vu des résultats de la deuxième phase d’essai, les récoltes ont également été espacées de précoce à tardive afin de comparer les rendements. Si les résultats n’ont pas encore été publiés, une modalité en seigle associé à du trèfle, prévue pour une récolte très précoce, semble prometteur après la première année d’expérimentation. « Le seigle est très agressif, mais comme il est récolté tôt, la prairie a le temps de repartir », constate Jean-Luc Gayet.