Politique et société

Mercosur : syndicats agricoles et députés unis contre l’accord

« Je ne veux pas aller par quatre chemins. Chez Jeunes Agriculteurs nous sommes fortement opposés au traité du Mercosur », a lancé Quentin Le Guillous, secrétaire général Jeunes Agriculteurs, mardi 23 septembre à l’Assemblée nationale. Devant la commission des Affaires économiques réunie pour une table ronde sur l’accord commercial entre l’Union européenne et le Mercosur, il a dénoncé « un double jeu » de la Commission européenne, accusée d’affaiblir la politique agricole commune (Pac) tout en ouvrant la porte à des importations ne respectant pas les normes européennes.

la commission des Affaires économiques réunie pour une table ronde sur l’accord commercial entre l’Union européenne et le Mercosur

À l’initiative du député François Ruffin, les cinq principaux syndicats agricoles étaient réunis aux côtés de plusieurs parlementaires. Tous, de manière unanime, ont redit leur opposition à cet accord signé en décembre 2024 par Ursula von der Leyen et dont le processus de ratification vient d’être relancé par Bruxelles. « Nous sommes hostiles à une forme de commerce dans lequel l’Europe n’exerce pas une réciprocité », a insisté Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, qui appelle le président Emmanuel Macron à clarifier sa position.

Le cas des pesticides et des normes

Les syndicats pointent en particulier l’écart entre les règles imposées aux agriculteurs européens et celles pratiquées dans les pays du Mercosur. Quentin Le Guillous a détaillé :
« L’Union européenne impose des règles strictes aux agriculteurs mais ouvre ses marchés à des produits non conformes, que nous produisons déjà en quantité suffisante en France et en Europe. Sur la culture du maïs au Brésil et en Argentine, par exemple, 178 molécules sont autorisées. Parmi elles, 92 sont interdites en Europe et 138 en France. » Un argument récurrent, la crainte d’une concurrence déloyale sur les marchés agricoles européens, notamment pour la viande, le sucre ou encore le miel.

Une résolution parlementaire en préparation

Le député François Ruffin a annoncé « le dépôt d’une proposition de résolution signée par plus de 100 députés de tous bords ». Le texte demande à l’État de saisir la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour examiner la conformité de l’accord au droit européen, notamment sur les plans sanitaire, environnemental et démocratique. « 76 % des Français, les députés à la quasi-unanimité… il y a un souhait profond de la France de refuser cet accord », a rappelé le député, citant le risque de voir disparaître une partie de l’agriculture française au profit de « fermes-usines au Brésil ».

L’agriculture française sur la défensive

Derrière ce front commun se dessine une inquiétude plus large, la fragilité d’un secteur déjà en tension. « Seulement 20 % des agriculteurs ont moins de 40 ans », a rappelé Quentin Le Guillous, soulignant que le Mercosur, en accentuant la pression économique, pourrait compromettre l’installation des jeunes générations. Pour Stéphane Galais, représentant de la Confédération paysanne, l’enjeu est aussi sociétal : « Les citoyens veulent une alimentation de qualité et saine. » La Coordination rurale a pour sa part dénoncé des « clauses de sauvegarde inefficaces ».

Appel à la mobilisation le 26 septembre

Le dossier Mercosur s’impose ainsi comme un nouveau marqueur de la fracture entre Bruxelles et le monde agricole français, qui entend peser dans le débat avant toute ratification. Dans ce contexte, Jeunes Agriculteurs et la FNSEA appellent à une mobilisation nationale le 26 septembre. L’objectif est, selon l’alliance, de dénoncer les incohérences de la politique commerciale européenne, rappeler les dangers de la concurrence déloyale et exiger des garanties pour l’avenir du modèle agricole français.
Chaque structure JA- FDSEA est invitée à agir sur son territoire, par des actions locales et une forte communication, afin de rallier le soutien des citoyens comme des responsables politiques. 

« Il y aura des rencontres avec les parlementaires, des actions au sein des grandes surfaces pour contrôler les produits mais aussi aux frontières pour contrôler les importations. Des feux de la colère et des blocages ponctuels sont aussi possibles », 

a indiqué Maxime Buizard-Blondeau, membre du bureau de JA le 17 septembre, à l’occasion d’une conférence de presse au Salon mondial de l’élevage (Space) à Rennes. « Plus que jamais, nous avons besoin de signaux positifs pour installer des jeunes et donner un cap à notre agriculture », insiste JA.