« J’aimerais bien voir ailleurs avant de revenir m’installer »
À 17 ans, Pablo Letablier, en première année de BTS Acs’agri, a choisi de s’investir comme bénévole au Space. Issu d’une famille d’agriculteurs, il incarne cette nouvelle génération qui se projette dans l’avenir du métier, entre soif d’ailleurs, inquiétudes et espoirs technologiques.

Dans les allées du hall bovin du Space, on croise Pablo Letablier, sourire franc et énergie débordante. Ce Rennais de 17 ans, étudiant en première année de BTS ACS’Agri (Analyse, Conduite et Stratégie de l’entreprise agricole), vit sa première expérience au Space comme bénévole. Avec ses camarades, il participe aux soins quotidiens des animaux exposés : traite, alimentation, nettoyage. « On passe trois heures derrière les vaches le matin, et après on a le temps de visiter le salon », raconte-t-il. Leur engagement permet de financer un voyage d’étude, cette année en Pologne, pour découvrir d’autres systèmes agricoles.
L’ambition d’apprendre ailleurs
Fils d’agriculteurs, Pablo ne se destine pas à reprendre immédiatement la ferme familiale. « Mes parents sont encore jeunes. Avant de m’installer en France, j’aimerais aller voir ailleurs », confie-t-il. Déjà parti en Norvège en stage, il rêve désormais de la Nouvelle-Zélande, pays aux quarante millions de moutons, où le pâturage reste roi. « Faire beaucoup de pays, c’est mon ambition. Pour l’instant, je n’ai que des aperçus, mais je veux découvrir sur le terrain », résume-t-il. Une soif de découverte qui nourrit son projet de compléter son BTS par une licence avant d’envisager, dans dix ou quinze ans, son installation.
L’innovation comme horizon
Curieux, Pablo parcourt les stands technologiques du Space. Robots de traite, tracteurs autonomes, intelligence artificielle ; il y voit les prémices d’une révolution. « L’intelligence agricole, c’est sûrement l’avenir du métier. Mes parents ont déjà commencé à utiliser des robots de traite, et on se dit bien que c’est le début d’une nouvelle ère », constate-t-il.
Pour autant, son enthousiasme s’accompagne d’inquiétudes. « Ce qui me fait peur, c’est qu’on nous oblige à aller vers de l’agriculture intensive. Les fermes deviennent de plus en plus grosses, et je me demande si dans dix ans, il ne restera que de l’intensif ou du hors sol », redoute-t-il. À l’adresse des autorités, il plaide : « Écoutez davantage les agriculteurs. »
Le parcours de Pablo s’inscrit dans un enjeu majeur, celui du renouvellement des générations. En cinquante ans, le nombre de chefs d’exploitation a chuté de 71 %, et la moitié des exploitants actuels partiront à la retraite dans les cinq ans. Avec 30 % d’entre eux âgés de plus de 55 ans sans successeur identifié, l’avenir de la ferme France est préoccupant. Aujourd’hui, les trois quarts des jeunes installés ne sont pas issus du monde agricole. Pablo, lui, en est issu, mais choisit d’élargir son horizon avant de revenir. Une trajectoire qui dit beaucoup du rapport des jeunes à ce métier ; entre fidélité familiale, ouverture internationale et besoin d’innovation.